Depuis quelques années, nous assistons à une révolution dans le domaine médical. Si c’est un domaine qui avance tous les jours à pas de géant, l’arrivée de la technologie a drastiquement changé la donne. Aujourd’hui, de nombreuses opérations sont faites avec assistance robotique, les machines nous aident à survivre en externe ou en interne.
Pour autant, les médecines dites « douces » ou alternatives n’ont jamais connu autant de succès. Et si, en France, il est bon de se méfier du praticien qui nous prend en charge, les résultats n’en restent pas moins là. L’une de ces pratiques est l’hypnose.
Et c’est aujourd’hui que le lien entre les méthodes du passé et celles du futur se joue. En effet, il y a quelques années, les praticiens de l’hypnose médicale rencontraient les petits génies de high-tech. Le résultat est bluffant. Revenons sur les enjeux et les bénéfices de cette association incroyable.
1 – Principes de l’hypnose médicale.
Afin de comprendre le fond du sujet, il est nécessaire de faire une petite mise au point sur la pratique de l’hypnose médicale.
A – Qu’est-ce que l’hypnose médicale ?
Loin de l’hypnose de rue, du spectacle, l’hypnose médicale est une aide véritable dans la gestion du stress, de l’angoisse, de la dépression mais aussi de la douleur aiguë ou chronique. C’est une technique qui vise à modifier légèrement l’état de conscience du patient dans le but de le positionner entre veille et sommeil. Le patient reste parfaitement conscient de ce qui se passe mais le vit de loin, comme à travers une vieille radio à transistors. Dans le domaine des soins psycho-corporels, c’est un soin qui s’adresse directement à l’inconscient, laissant le conscient spectateur de la situation.
Pour rappel, le conscient c’est le présent ; ce que vous dites et faites. C’est la résultante de votre volonté de façon directe. L’inconscient, lui, c’est votre jardin secret, votre instinct, mais aussi votre disque dur, car rien ne lui échappe. Un traumatisme, une douleur sera inscrite en lui à vie. Le problème réside dans le fait que votre conscient a la parole pour s’exprimer, mais que votre inconscient lui n’a que votre corps. Il vous envoie des signes sous forme d’émotions, d’intuitions et parfois même sous forme de douleur lorsque vous refusez de l’entendre ou que le temps presse.
Le but de l’hypnose médicale est donc de donner la parole à l’inconscient afin d’aider au dialogue de votre conscient et de votre inconscient. Si cela est un outil précieux en psychothérapie, il s’avère que c’est également une aide de choix dans la gestion de la douleur. Dans cet état, vous ne ressentez plus la douleur de la même manière. Mieux encore, plongé dans l’état hypnotique vous pouvez apprendre à votre inconscient à gérer l’information douloureuse comme une information secondaire.
B – La douleur comme enjeu
Dans notre organisme, la douleur a plusieurs fonctions. La principale est de vous indiquer un danger. Excellent signal d’alerte, elle apparait quand un élément extérieur dangereux est en contact avec vous (je tombe, je me coupe, je me brûle …) ou quand votre organisme est défaillant (j’ai un caillou dans le rein. Sa fonction est très importante et si je ne fais rien, mon pronostic vital peut être engagé…). Aussi la douleur génère-t-elle naturellement la peur qui est là pour vous faire réagir.
Cependant, dans le cas de la douleur induite (par un acte invasif, par une pathologie, …), cette dernière est un facteur secondaire. Or, votre inconscient, lui, le prend de plein fouet comme un signal de danger imminent et, à terme, ce sentiment peut provoquer bien des ravages dans le corps et l’esprit (douleur chronique, dépression….).
L’hypnose médicale est donc apparue comme une solution permettant « d’expliquer » à l’inconscient qu’il était en sécurité et que ce n’était que passager. Dans le cadre de douleur faisant suite à une pathologie, l’hypnose apaise l’inconscient de la charge émotionnelle que la douleur génère en le rassurant sur son caractère non dangereux. Cette explication est un peu imagée, mais le principe est là.
C – En pratique
Dans la pratique, une séance est plutôt longue (compter pas loin d’une heure par séance) et complexe pour le praticien, voire pour le patient. Elle nécessite une formation importante et une grande confiance en soi de la part du praticien.
Outre l’apport théorique sur les principes et enjeux de l’hypnose médicale, la formation va consister en l’apprentissage d’un vocabulaire, d’une rythmique dans la verbalisation et d’une tonalité particulière de la voix. Elle permet également d’apprendre certains procédés d’imagination. Car l’un des piliers de cette pratique est d’imager les choses. « Vous descendez à présent un grand escalier … », « Vous êtes dans une grande prairie au bord d’un chemin … ».
D – Les limites
C’est là qu’interviennent les limites. Elles sont de deux types : soit elles viennent du praticien, soit elles viennent du patient.
Du côté du praticien
C’est un challenge à chaque mise sous hypnose. Il faut connaitre son public, savoir s’y adapter, mais surtout avoir suffisamment confiance en ses capacités. Or, dès que l’enjeu devient lourd, la confiance est mise à mal, et sans confiance, la voix n’est pas posée, le rythme n’est pas régulier. Il est évident qu’un praticien qui gère une douleur chronique en cabinet n’a pas le même stress que celui qui doit gérer un geste invasif en bloc opératoire.
De plus, les formations en hypnose médicale sont longues et coûteuses. Parfois, certains soignants « attrapent la maladie de l’alternatif » et s’en servent comme pis aller pour se lancer en solo sur une autre orientation. D’autres ne l’utilisent pas ou peu, faute de temps, de possibilité.
Car c’est aussi une question de temps.
En service hospitalier et a fortiori en bloc opératoire, le praticien joue contre la montre. Il doit avoir le temps de mettre en place l’état hypnotique, doit pouvoir rester avec le patient pour le conserver. C’est donc une activité de soin très chronophage. Or, dans les milieux de soins, il n’existe pas à ce jour de personnel dédié à ces pratiques. C’est l’infirmière, l’aide soignante, l’anesthésiste… qui prend sur son temps de travail, quand il ou elle le peut, afin de mettre ce dispositif en place. Dans de rare cas, on détache à cet agent quelques heures de son planning pour qu’il ou elle puisse aller voler au secours des patients dans les services.
Enfin, du côté praticien, on peut aussi compter sur l’environnement. En effet, un cabinet n’a pas le même taux anxiogène que le bloc opératoire ou le service hospitalier. Et l’environnement est un facteur clé car le patient doit pouvoir y trouver un peu de calme.
Du côté patient
La limite est assez simple à concevoir. D’une part, certaines personnes sont totalement réfractaires à ces méthodes, et, d’autre part, certaines n’ont pas la patience ou l’imagination nécessaire pour réussir à suivre la séance. En outre, le stress généré par une situation peut rendre le procédé complètement inefficace.
Dans notre cas, on va surtout s’intéresser à l’utilisation sur l’acte douloureux, invasif voire chirurgical. Il faut savoir que, dans certains pays l’hypnose, a permis de réaliser des opérations très complexes sur des patients ne pouvant bénéficier d’une anesthésie. Je pense notamment à une opération vasculaire au niveau des vaisseaux du cou, effectuée en Asie, il y a quelques années. Mais afin de ne pas digresser davantage, je vous conseille le documentaire magnifique « ma voix t’accompagnera » paru sur ARTE il y a peu.
2 – Des solutions dans l’innovation
A – L’apport de la réalité virtuelle
Partant de ces connaissances, on entrevoit facilement comment la VR a pu devenir un allié dans le développement de l’hypnose. En pratique, le patient est immergé dans un environnement virtuel ou réel (vidéo 360°), selon les applications. Il peut avoir de la musique ou même un parcours vocal respectant les mêmes codes hypnotiques que l’hypnose directe.
Cette solution permet de capter le regard du patient, pour induire, avec les mêmes codes de rythmique vocale, l’état hypnotique. C’est d’autant plus efficace que le patient n’a pas à fermer les yeux, ce qui était un souci chez les grands anxieux. La vue est le sens principal de l’être humain. En trompant la vue, il est bien plus simple de tromper la conscience à tous ses niveaux. De plus, le patient n’a plus besoin d’imaginer puisque l’image s’impose à lui. Lorsque vous êtes plongé dans un film génial à la télévision, il vous arrive de ne plus entendre lorsque le téléphone sonne ou qu’on vous parle. Le principe est un peu le même en beaucoup plus prégnant.
Avec la réalité virtuelle, on peut facilement faire fi de l’environnement. L’outil provoque un effet « waou » qui n’est pas inutile dans notre cas. Le patient va être intrigué et, de ce fait, être plus coopératif. Il a l’assurance qu’il peut s’endormir à tout moment ou demander une sédation par mise à disposition d’une pompe. Enfin, même dans un environnement peu confortable, il est possible de détendre le patient en l’isolant au niveau visuel et auditif afin de garantir le calme par deux de ses sens principaux.
La vraie révolution !
Elle se trouve, cependant, du côté praticien. En effet, il n’est plus nécessaire d’avoir une personne dédiée, ou formée à l’hypnose. Une simple formation dans l’utilisation de l’outil virtuel très courte est nécessaire. Le soignant accompagnant est donc là en cas de besoin, mais il a le champ libre pour faire ce qu’il doit faire en parallèle. Il a un écran de contrôle qui lui montre ce que voit l’utilisateur en temps réel. Dans ce cadre, l’accompagnement vocal direct n’est plus la contrainte principale, mais un plus qui peut être mis en place librement. Toutes les contraintes liées au praticien sont donc levées. C’est le dispositif qui prend en charge le côté technique.
B – Les plus !
Et puis il y a les petits plus. En outre, le dispositif a aujourd’hui évolué pour répondre à des caractéristiques jusqu’à très récemment secondaires. Il est en effet possible d’assurer une hygiène maximale de ces outils avec des outils comme la CleanBox et en mettant en place des protections qui s’adaptent à l’ergonomie épurée des casques (attention cependant à la mousse de confort, souvent poreuse et difficile à nettoyer).
Et qui dit outil simple à utiliser et facile à entretenir, dit qu’il peut être démocratisé. Et ce n’est pas seulement les services durs qui peuvent bénéficier de ces solutions, mais bien tous les services. Du pansement d’escarre en EHPAD, au changement de cathéter en pédiatrie, en passant par tous les soins et spécialités, c’est un outil qui s’adapte à toutes les circonstances puisque les sessions sont travaillées en fonction du temps nécessaire de « sédation sans substance ». La réalité virtuelle concerne le parcours de soins tout entier.
C’est donc l’assurance d’un patient serein et d’une meilleure adhésion au soin ainsi qu’une meilleure convalescence. De ce fait, le patient est théoriquement amené à être présent moins longtemps en service et à utiliser moins de produits. C’est un gain financier également non négligeable à terme. Dans ce cadre, il est donc bon de voir au-delà du coup de mise en place.
C – Les pièges
Mais attention. Si beaucoup s’essaient au jeu, il est bon de connaitre tout de même certains écueils. Par exemple, il est bon que le milieu soit adapté au patient ciblé. De même, on adaptera l’accompagnement vocal au patient pour un effet optimal. Il peut être réaliser directement par le soignant, indirect avec un parcours pré-enregistré ou musical.
Evidemment, on préférera des ambiances calmes, des grands paysages, des couchers de soleil, éventuellement des paysages froids, la présence d’ombre ou d’eau ; ces éléments qui nous évoquent, plus ou moins consciemment, le calme intérieur, et donc aident à calmer la douleur.
Un autre point important se trouve dans la qualité du dispositif. En effet la ‘mode’ est à la ‘solution maison’. Certaines facultés de médecine s’allient avec des facultés techniques pour tenter de faire une solution moins chère et dédiée à l’hôpital en question. De mon point de vue, c’est un risque car il n’est pas si aisé de faire une application de qualité dans ce domaine. Le graphisme doit être irréprochable. Une aberration chromatique, un décalage de l’image, une incohérence sont des risques de voir l’effet s’annuler entièrement ou en partie. De plus, l’étude du dispositif analgésique doit répondre à des codes particuliers. Il ne suffit pas de projeter le patient sur une plage déserte avec une musique zen.
Pour éviter ces problèmes des soignants passionnés et formés dans le domaine technique peuvent aider à faire le lien entre les génies de l’Hight-Tech et les équipes de soins.
D – Petit tour d’horizon
Ce n’est pas dans mon habitude mais je fais une exception. Très intéressée par la gestion de la douleur, j’ai commencé à faire un peu le tour des concepteurs de contenus. Il y a de très belles réalisations. En voici quelques-unes. Je préviens par avance que c’est un avis et des ressentis très personnels sur ces travaux.
L’Ouest français est soutenu par le Projet Bliss . Une expérience d’emblée centrée sur un monde en 3D complète avec un aspect peu réaliste des décors. Une expérience qui vous plonge dans les mondes de l’enfant qui sommeille en chacun de nous.
A Paris, c’est HealthyMind qui nous offre des réalisations 3D réalistes magnifiques. L’accompagnement est adaptable pour détendre et rassurer les patients dans des milieux très différents (du pansement à la salle de réveil en passant par le don du sang).
Dans l’Est, on trouve les Strasbourgeois d’HypnoVR également centrés sur des ambiances 3D très plus proches du réel.
D’autres encore, comme les Lyonnais DeepSen , ont fait le choix de vidéo 360°. Un large choix d’univers vous plongeant dans la beauté du réel et du temps présent.
Enfin les outsiders belges de chez Oncomfort ont, eux, développé également des milieux très enfantins pour aider les enfants à gérer leur douleur et leur anxiété. Ces milieux sont entre autres des mini jeux : un vrai bijou !
(Dans la majorité des cas, ces entreprises louent le matériel adéquat)
Conclusion
Grâce au génie combiné des ingénieurs de l’industrie VR et des médecins anesthésistes spécialisés en hypnose, et avec, parfois, un coup de pouce non négligeable des entreprises d’accompagnement de la VR (qui fournissent des solutions matériels clé en main avec ou sans formation du personnel), c’est une incroyable avancée pour la prise en charge de la douleur des patients qui se met en place.
Chaque jour, de nouveaux contenus sont créés et travaillés en ce sens. Des dizaines d’établissements de santé se mettent en lien avec les facultés de sciences pour créer des versions nouvelles de logiciel à visée antalgique.
En faisant attention à quelques pièges, une révolution se joue pour des patients de plus en plus stressés et aux pathologies de plus en plus complexes. Le but : qu’on puisse enfin exercer des soins sans douleur.